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08/03/2023

Duchamp divisé: Le porte-bouteille

 

Duchamp divisé

Le porte-bouteille

 

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  Nous poursuivons le développement de notre  message du 8 juin 2021, « Marcel Duchamp topologue », sur la note d’Albert Gauvin,  « Marcel Duchamp l’anartiste »,  du blog de Philippe Sollers, Pileface. Nous reproduisons l’image de référence qui l’accompagne.

  Nous mettions en série le porte-bouteille de Duchamp, la projection de son ombre sur deux murs perpendiculaires  et la projection semblable d’un cube dans un dessin de A l’infinitif, la Boîte blanche,  qui répondent à la recherche duchampienne de la représentation de la quatrième dimension. Ces documents faisant partie de la note d’Albert Gauvin.

  Notre message sur cette note formule en un diagramme le savoir insu de Duchamp concernant la structure de l’acte pictural.

   C’est ainsi que nous allons développer ce qui dans le choix du porte- bouteille relève de l’inconscient  comme invention de savoir.

 

  Le dispositif de notre diagramme.

  Le porte-bouteille se présente comme une armature métallique qui a la forme d’une bouteille entourée de séries étagées de tenons, chacun destiné à pénétrer dans le goulot d’une bouteille.

  Les bouteilles  qui y seraient disposées, sont conçues sur le modèle de l’armature centrale, à une échelle plus réduite et inversement orientées.

   A leur tour, chacun de leurs tenons pénètre dans le goulot d’une armature d’échelle inférieure, et ainsi de suite.

  Ainsi, à chaque niveau d’échelle, la diminution tend vers l’infiniment petit, celle-ci transposée sur l’échelle numérique de l’ouvert (1, 1/2, 1/3,1/n…).

  L’outrepassement de la limite de l’ouvert, c’est l’infini actuel qui s’inscrit comme la projection de ce dispositif tridimensionnel du porte- bouteille sur les deux dimensions du plan ; soit l’attracteur étrange de Mandelbrot, en lequel le détail enveloppe le tout. Ce qui est le propre de la structure autoréflexive de l’infini actuel.

  C’est ainsi que la bouteille de Klein enveloppe l’armature du porte-bouteille, soit l’auto-enveloppement de l’infini actuel : la torsion du dehors et du dedans, en la continuité de sa surface.

 

  Le savoir insu

  En ce qui concerne le savoir insu de l’artiste soit ce qui relève de l’inconscient, nous nous référons à Lacan J., le Séminaire Livre XXIII, pp. 85-86. Il y est question de la relation de la  vérité au réel. Ce qui pour nous relève du destin de la peinture, soit ce qui d’une œuvre fait date dans l’histoire, de par le sens qu’elle y apporte.

  Dans les pages que nous venons de mentionner , Lacan met en série ce qu’il appelle l’auto-perforation du vrai avec la création du sens, « de ce qu’il glisse, de ce qu’il est aspiré par l’image du trou corporel dont il est émis, à savoir la bouche en tant qu’elle suce ». Il y arrime, la pulsion scopique, par la fonction du temps logique de l’instant de voir.

   L’image du trou, émettrice du sens  provient de l’effraction de l’après-coup de la pulsion scopique dans la clôture narcissique de « l’aveugle succion » qui précède l’imago spéculaire, comme Lacan le déplie dans son « Propos sur la causalité psychique » de ses Ecrits.

  C’est ainsi que l’image du trou est la forme d’une identification, elle-même supportée par le trait différentiel surgi dans l’échange de lallation de l’infans avec la mère.

Etant donné que nous  conférons au porte-bouteille comme dispositif la fonction de diagramme prenant place dans la quête de Duchamp, ses tentatives de représentation de la quatrième dimension, nous considérons que le rapport du tenon au goulot est celui du sujet à la succion, soit l’infrastructure de l’auto-perforation du vrai, dont le paradoxe du menteur est le paradigme.

    En bref le rapport du goulot au tenon ne figure pas le rapport de la bouche à la  mamelle mais l’introjection du signifiant que Freud avait repéré comme la première identification soit l’amour pour le père avant toute relation à un objet. C’est le signifiant qui supporte la consistance logique spéciale  de l’association libre, l’automaton, que Lacan a appelé signifiant du Nom-du-Père.

 

  L’acte pictural

  Nous mettons en série cette structure de la succion, sa clôture avec le chiasme touchant- touché auquel  Merleau-Ponty, dans Le visible et l’invisible  identifie une structure réversive : « De même le touchant- touché. Cette structure existe dans un seul organe – la chair de mes doigts = chacun d’eux est doigt phénoménal et doigt objectif, dehors et dedans du doigt en réciprocité, en chiasme, activité et passivité couplées ». Cette structure est analogue à celle de la pulsion freudienne. Il s’agit donc de la structure de l’auto-enveloppement, celle de l’infini actuel tel qu’il s’exprime  dans la surface de la bouteille de Klein et dans la fonction numérique qui supporte ce diagramme de l’attracteur étrange de Mandelbrot.

  Ainsi nous posons l’acte pictural comme fondé sur cette structure, dans la rencontre de la dynamique du geste et de l’inertie du support. La touche fonctionne comme la lettre qui inscrit l’image du trou comme le support de ce qui fait date dans l’histoire, la vérité de la peinture.

 


08 07 2023
Nous avons placé cette note en annexe de notre dernière publication, consultable à la bibliothèque Kandinsky:

Présentation de l'infini dans l'acte pictural- Le temps du toucher, Autédit, Paris, 2023.